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partie centrale qui "pousse"

2015: Ultimate Iceland (Volcan Holuhraun)

Lundi 16 février (vol Genève-Reykjavik)

Vol direct de Genève à Reykjavik en Islande. Durant le survol de l’Islande je fais la connaissance de Christophe, un photographe Français qui est venu chasser les aurores boréales. Des vents violents soufflent sur le tarmac de l’aéroport de Keflavik et l’avion vol en cercle jusqu’à ce qu’une ouverture permette l’atterrissage. Finalement nous parvenons à nous poser sans encombre en fin de journée, malgré les grandes secousses engendrées par les vents. Nous sommes apparemment au cœur d’un blizzard polaire!

Je confie à Christophe que je suis venu en Islande pour assister à l’éruption du volcan Holuhraun et que depuis la veille les autorités Islandaises y permettent l’accès terrestre ! Christophe est immédiatement emballé par cette nouvelle et me dis qu’il essayera de me rejoindre au Nord à Akureyri pour prendre des clichés de l’éruption.

Le thème de notre voyage est un peu différent, mais nous avons les deux l’intention de ramener des images à couper le souffle de ce pays magnifiquement contrasté.

La suite du voyage démontrera que Christophe n’est pas venu pour rien dans cette contrée polaire. En effet les aurores boréales furent au rendez-vous et en voici la preuve :

Récit et images du voyage de Christophe en Islande

Je rejoins l’hôtel Odinsve à Reykjavik en Flybus avant de souper au restaurant Solon (le restaurant fétiche de John). Je ne m’attarde pas trop, car le lendemain est le jour tant attendu où je ferai la connaissance du volcan et de ses incroyables coulées de lave !

Mardi 17 février (survol de Holuhraun)

Lever très matinal pour rejoindre l’aéroport domestique de Reykjavik et décollage pour Akureyri à 7h15. Le ciel est dégagé en atterrissant à Akureyri, ça change de Reykjavik où le temps est exécrable. L’aventure nordique peut enfin commencer !

Un taxi me dépose à l’hôtel Icelandair où je passerai les quatre prochaines nuits.

Je profite d’un peu de répit pour visiter la petite ville d’Akureyri et acheter une chapka chaude. Contrairement à Reykjavik où le blizzard sévit, Akureyri est pratiquement dépourvue de neige ! En fait la région a bénéficié d’un climat inhabituellement doux pour la saison et donc la majeure partie de la neige a fondu.

Akureyri, avec ses 17'754 habitants, est la capitale de la région Norðurland eystra et est un important port maritime. D’ailleurs, dans l’album L’étoile mystérieuse, Tintin et l’expédition polaire du FERS font escale à Akureyri pour faire le plein de mazout. La ville se trouve sur les bords du fjord Eyjafjörður et du fleuve Glerá. Elle est située à 50 km au sud du cercle polaire. L'image du centre-ville d'Akureyri est fortement influencée par l'église Akureyrarkirkja (l'église d'Akureyri). La grande église qu'on appelle aussi la cathédrale de la glace est clairement visible sur la colline d'où elle domine la ville. Elle fut construite par l'architecte islandais Guðjón Samuélsson. D'après ses intentions, la couleur et la structure en béton rappelleraient la nature des environs. Les vitraux représentent des scènes de l'histoire ecclésiastique de l'île.

En fin de matinée John m’envoie un message pour me dire que l’éruption du volcan Holuhraun venait de s’arrêter il y a quelques heures! Je suis pris de stupeur, car l’observation de l’éruption est la raison principale de ma venue en Islande. Ça fait depuis septembre que le volcan vomit des torrents de lave et vraisemblablement la source magmatique est en train de se tarir depuis mon arrivée en Islande. Décidément le sort n’est pas de mon côté ! Il était prévu de survoler le volcan à 14h00 et je comprends que le temps est maintenant compté si je veux voir quelque-chose. La compagnie aérienne Myflug me téléphone pour me dire que le décollage est avancé d’une heure. C’est donc la dernière occasion de voir une quelconque activité du volcan.

Un taxi me dépose  au hangar #13 de l’aéroport et je trépigne d’impatience de survoler le volcan avant que ce ne soit trop tard. Les autres passagers viennent me rejoindre avant que le groupe précédent atterrisse de leur vol volcanique. Ils me disent que le volcan est toujours actif, même si le débit des coulées de lave a diminué. Je reprends espoir et nous attendons le dernier passager qui n’est toujours pas là. Finalement l’équipe est au complet et nous embarquons dans un Cessna 206 Stationair, un petit avion polyvalent adapté aux vols touristiques et à la photographie aérienne. Je prends place à côté du pilote et nous décollons enfin. Le dieu Odin est avec nous, car le temps est magnifique, pourvu que ça dure ! Nous survolons des collines enneigées, des rivières étincelantes qui serpentent au fond de vallées inhabitées, et des étendues désolées sur lesquelles des coulées de lave ancestrales se sont figées. Nous entrons dans le parc national de Vatnajökull où personne ne vit et je prends conscience que nous nous aventurons dans un des lieus les plus hostiles et reculés d’Islande. Les champs de lave cèdent la place à des montagnes (ou plutôt à des volcans) et j’aperçois le Herðubreið, toponyme islandais signifiant littéralement en français « le large d’épaules ». Les Islandais la surnomment la reine des montagnes. Culminant à 1 682 mètres d'altitude et à environ 1 000 mètres au-dessus des terres environnantes, ce volcan est un tuya ceinturé en totalité par des falaises délimitant un plateau sommital sur lequel repose un cône volcanique d'environ 200 mètres de hauteur. Le Herðubreið s'élève au centre du désert Ódáðahraun, en français « Désert des Crimes », formé par l'assèchement de l'air qui passe au-dessus du glacier Vatnajökull situé au sud et nommé ainsi car des criminels autrefois rejetés par la société y élisaient domicile.

Après avoir dépassé le volcan Askja, qui abrite le lac Öskjuvatn profond de 220 m, nous débouchons sur la plaine où le volcan Holuhraun a créé un champ de lave noir aussi vaste que l’île de Manhattan. En effet le 29 août 2014, le Bárðarbunga, un important volcan sous-glaciaire, entra en éruption par l'ouverture d'une fissure volcanique dans le Holuhraun. Avant l’éruption, cette zone désertique était traversée par de nombreux petits cours d'eau alimentés par la fonte du glacier Dyngjujökull et qui donnent naissance à la Jökulsá á Fjöllum, le second plus long fleuve du pays. La coulée de lave issue des fontaines du Holuhraun progressa vers le nord-est entre deux bras de ce fleuve. La lave a ainsi totalement recouvert les cours d’eau et a même rejoint le fleuve. Il en résulte de nombreuses fumerolles qui s’échappent du champ de lave au point de contact avec le fleuve. Au début de l’éruption d’immenses fontaines de lave de 80 m de haut jaillissaient de la fissure. L’intensité de l’éruption a faiblit au fil des mois, laissant la place à un immense lac de lave très actif, dont la superficie est en train de diminuer. Finalement l’avion arrive à l’aplomb du volcan et je découvre ses entrailles bouillonnantes. En effet le lac de lave est encore actif et plusieurs fontaines expulsent la roche en fusion de la fissure qui est devenu entre-temps un cratère longiligne en forme de rigole géante. Le spectacle est saisissant et tous les passagers sont en admiration devant la puissance qui se manifeste à quelques centaines de mètres au-dessous de l’aéronef. Les borborygmes incandescents brassent cette soupe visqueuse de basalte fondu qui se déverse ensuite à l’extrémité Nord de la fracture. Ce spectacle dantesque nous fait sentir bien petit face au monstre magmatique qui essaie de déchirer la fine croute terrestre afin d’accroître l’espace entre les plaques continentales européennes et américaines. Nous faisons plusieurs passages au-dessus de cette marmite infernale en savourant chacun de ces instants fugaces et rares qu’offrent parfois la nature tourmentée de l’Islande, laquelle se manifeste aujourd’hui avec une splendeur dévastatrice. Nous sommes privilégiés en pouvant survoler le volcan, car ce dernier libère de grandes quantités de gaz mortels qui limitent l’accès terrestre. Le dioxyde de soufre émis par l’éruption s’élève en moyenne à 20'000 – 60'000 tonnes par jour. Il s’agit de l’éruption avec la plus forte émission de gaz en Islande depuis le 18ème siècle ! En comparaison, le total des émissions de SO2  par tous les états membres de l’Union Européenne est estimé à 14'000 tonnes par jour. Finalement le pilote fait demi-tour pour retourner à Akureyri. Nous avons plein d’images dans la tête et ces moments émotionnels intenses resterons indélébiles.

 

Un des passagers me ramène au centre-ville d’Akureyri et je fais quelques emplettes au centre commercial. En effet il faut prévoir un pique-nique pour la longue excursion du lendemain, car cette fois on tentera une approche terrestre du volcan !

Mercredi 18 février (approche terrestre de Holuhraun)

C’est le grand jour tant attendu, l’approche du volcan Holuhraun par voie terrestre ! En fait ça ne fait que depuis quelques jours (le 15 février) que les autorités permettent l’approche du volcan sans un permis spécial. Jusque-là seul les scientifiques et les journalistes avaient le droit de s’aventurer aux abords du volcan, pour autant qu’un permis leur fût délivré. Cet assouplissement des règles est probablement le résultat de la diminution récente de l’activité volcanique. C’est une chance incroyable, car maintenant n’importe qui peut tenter une approche, du moins jusqu’à maximum 7.5 km.

Ça fait quelques temps que j’étais en contact avec l’agence IceAk qui est la seule agence à proposer des expéditions au média. Des complications administratives m’avaient empêché d’obtenir le permis pour Holuhraun (malgré ma carte de presse) et je suis donc enchanté de pouvoir concrétiser le projet sans le sésame tant convoité. Thordur, le guide de IceAk, ainsi que sa compagne viennent me chercher en Superjeep à l’hôtel Icelandair à 10h15.

A la réception de l’hôtel je me rends compte que les employés sont costumés et que des enfants grimés viennent chanter pour recevoir des bonbons. Thordur m’explique qu’il y a beaucoup de fêtes en Islande. Je pense que c’est l’occasion pour les habitants de maintenir une culture nordique et d’avoir des activités ludiques malgré le temps souvent capricieux. En l’occurrence, le 18 février, la tradition est d’offrir des gourmandises aux enfants qui viennent pousser la chansonnette.

Après une centaine de km en superjeep nous faisons une halte dans un restaurant à Myvatn où un buffet nous est proposé. J’ai ainsi l’occasion de déguster les spécialités locales telles que la soupe à l’agneau et les boulettes de viande. En effet la tradition pour le 18 février est également de manger une soupe d’agneau savoureuse. C’est le point de rendez-vous avec toutes les autres agences de la région qui veulent mettre en place un circuit touristique autour du volcan Holuhraun. En fait c’est la première fois, et probablement la dernière fois, que toutes les agences partent en expédition ensemble ! Et j’ai l’immense privilège d’en faire partie. Je suis donc le tout premier touriste à m’aventurer au pied du volcan !

Après ce bon repas il commence à neiger et notre convoi (7 véhicules au total) fait route pour Holuhraun. Heureusement le temps est très changeant en Islande et la neige cède rapidement la place à la pluie, puis au beau temps. Nous quittons la route goudronnée pour nous aventurer sur le chemin qui mène dans les hautes terres. La superjeep est très confortable et son GPS nous guide sans problème à travers le relief gelé.

Nous roulons sur un immense champ de lave avant d’entrer dans le parc national Vatnajökull. Avec ses 13'920 km2 (14% de la superficie de l’Islande), c’est un des plus grands parcs national d’Europe. Il a hérité son nom du gigantesque glacier qu’il abrite. En effet le Vatnajökull, avec ses 8'100 km2, est le plus grand glacier d’Europe (aussi vaste que la Corse !). Ce dernier recouvre plusieurs volcans actifs, dont le Bárðarbunga qui en est le plus grand. C’est à la fin août 2014 que l’éruption débuta dans le champ de lave de Holuhraun au Nord du glacier Vatnajökull. En fait l’éruption est liée à l’activité sismique dans la caldeira du Bárðarbunga. D’ailleurs un affaissement de la calotte glacière au-dessus de ce dernier suggère que le magma a atteint la surface sous la glace. On pense que l’eau de fonte aurait été collectée par le Grímsvötn, le volcan le plus actif du Vatnajökull et par un lac sous-glaciaire.

Les pneus cloutés des superjeeps sont indispensables pour rouler sur les zones glacées que nous traversons fréquemment. Malgré tout, une des voitures du convoi s’aventure trop loin sur la glace et se retrouve prise au piège. Son train avant s’est complétement enfoncé et il n’est plus possible de reculer. Un des véhicules, un pick-up surpuissant, lui vient en aide en le tractant hors du piège. Nous continuons notre route dans un environ où il n’y a pas âme qui vive. L’ambiance est au beau fixe et une des superjeeps en profitent pour faire la toupie sur la glace.

Les choses commencent à devenir sérieuses car nous entrons dans la vallée de Dyngjufjalladalur où le vent s’engouffre avec violence. Nous sommes dans les Dyngjufjöll, un massif de montagnes qui entourent les caldeiras d’Askja. La région est pratiquement dépourvue de végétation et les sources géothermales y sont nombreuses. Nous faisons une halte à la hutte de Dyngjufell, un abri providentiel contre le vent déchaîné. Cette petite hutte fût construite en 1993 et peut accueillir 16 personnes. Le tenancier déblaie les toilettes extérieures qui sont remplies de neige du sol au plafond afin de satisfaire les demoiselles du groupe.

Après 15 km de progression dans la vallée étroite où nous subissons une tempête de neige, nous débouchons sur un plateau enneigé qui domine la plaine de Holuhraun. Le ciel se dégage malgré un vent toujours fort et nous roulons à tombeau ouvert sur cette étendue blanche et plate. Les chauffeurs des différentes agences sont visiblement impatients d’arriver à destination. Certains véhicules rebondissent sur la neige et font plusieurs mètres dans les airs, c’est l’euphorie !

Soudain j’aperçois des phares au loin au beau milieu de ce panorama polaire. A ma grande surprise des voitures de police nous attendent de pied ferme ! Que peuvent bien faire les forces de l’ordre en plein milieu d’une région aussi inhospitalière à une centaine de km de la civilisation ? En fait une présence policière constante s’est établie dans cette région reculée et les agents s’y relaient pour surveiller les alentours du volcan Holuhraun. Apparemment ils ont eu ouïe dire de notre expédition et ils veulent s’assurer que nous ne franchirons pas les limites autorisées. D’ailleurs ils nous escorterons jusqu’à notre destination finale.

Après un bref entretien avec les policiers nous poursuivons notre chemin jusqu’à la limite autorisée, à 7.5 km du volcan. Nous ne manquons pas d’installer notre détecteur de gaz au montant de la portière. En effet l’inhalation de dioxyde de soufre est mortelle et nous ne voulons pas courir le risque d’avoir une accumulation d’acide sulfureux dans les poumons. Le GPS nous indique exactement où se trouve la ligne imaginaire infranchissable. Une colline s’élève de la pleine enneigée et par chance la frontière passe précisément par-dessus son sommet. Nous nous trouvons au pied de la colline et les voitures de tête nous communiquent par CB qu’ils souhaitent monter au sommet pour avoir un point de vue élevé sur le volcan. Je pensais naïvement que nous allions sortir des véhicules et gravir la colline à pied. Que nenni, les voitures se mettent en file indienne et commencent à escalader l’obstacle! Malgré une pente très raide, nous parvenons au sommet sans encombre. Là-haut il n’y a guère de place pour manœuvrer et nous agençons les superjeeps les unes derrière les autres. Il est 17h10 et nous avons mis presque 5h00 en superjeep à travers un environnement hostile pour atteindre notre objectif. La température n’est que de -4°C et pourtant un vent glacial souffle au sommet de cette zone exposée. Il est donc impératif de bien se protéger avant de sortir du véhicule. Heureusement le détecteur de gaz indique que l’air est respirable, il n’y a donc aucun risque.

Le panorama est saisissant, nous avons une vue à 360° sur toute la région de Holuhraun. Je reconnais parfaitement l’endroit que j’avais survolé la veille: l’immense champ de lave qui s’étend à perte de vue, les fumerolles qui s’échappent au point de contact avec le fleuve Jökulsá á Fjöllum et le renflement de la fissure volcanique qui renferme la lave en ébullition. Malheureusement nous ne sommes pas dans l’axe de l’éruption fissurale et donc la lave n’est pas visible. Depuis ce belvédère on pourrait croire que le volcan est éteint. Les guides discutent pour savoir quelle est la meilleure option pour la suite de notre expédition sachant que la police garde un œil sur nous. Finalement ils décident de rebrousser chemin pour avoir un meilleur angle de vue. Je me demande comment mon guide Thordur va manœuvrer la superjeep étant donné l’étroitesse de la colline. Il recule, puis avance afin de placer le véhicule perpendiculaire à la colline. Nous sommes ainsi à l’aplomb d’un précipice gelé et je ne vois aucune issue. Ce détail n’a pas l’air de gêner Thordur, car il met la marche avant et précipite la superjeep dans le gouffre ! Au début la voiture glisse sur la glace comme si nous faisions un schuss, mais heureusement la pente s’adoucit et nous nous trouvons rapidement au pied de la colline. Que d’émotions ! Les voitures qui nous précédaient suivent le même chemin déraisonnable que nous, mais c’est sans compter les capacités mécaniques hors du commun de nos véhicules et donc tout le monde parvient à descendre sans encombre.

Nous longeons la frontière virtuelle illustrée par le GPS en nous dirigeant vers le Nord. Il n’y a absolument aucun chemin qui y mène et nous roulons dans une neige épaisse. Nous arrivons sur un plateau qui surplombe notre site d’observation précédent où l’axe par rapport au volcan est plus favorable. La fissure volcanique a une configuration Sud-Ouest Nord-Est et donc nous essayons d’aller le plus à l’Est possible afin d’optimiser notre angle de vue. Malheureusement nous sommes stoppés par un obstacle infranchissable, les contreforts de l’Askja. Thordur essaye pourtant de gravir la forte pente enneigée, mais malgré les performances tout-terrain ahurissantes de notre véhicule, il est impossible d’aller plus loin. Nous retournons donc au bord du plateau où le reste de convoi s’est déjà installé avec leurs trépieds pour faire des prises du vue du volcan.

Il commence à faire nuit et le rougeoiement de la lave se révèle enfin au-dessus de l’édifice volcanique. D’ailleurs on aperçoit même des projections de lave qui atterrissent sur les parois internes de la fissure ! L’observation avec les jumelles montre clairement que le volcan n’est pas encore endormi, c’est un vrai régal. Nous sommes à plusieurs km du volcan et à une encablure de la zone interdite. Je m’imagine être au pied de ce dernier à admirer les vomissures incandescentes qui éclaboussent la fissure.

A 19h40 nous nous résignons à quitter le site d’observation pour retourner à Akureyri. En effet il reste encore du chemin à faire à travers la nature glacée des hautes terres. Le ciel est dégagé et j’essaye d’entrevoir des aurores boréales. Ce n’est que quelques km avant d’entrer dans le fjord Eyjafjörður que la providence se manifeste. En effet des aurores boréales apparaissent soudainement et ondulent au-dessus de notre tête. Elles ne sont pas très fortes, mais ce sont mes premières aurores et le spectacle est saisissant ! Après une journée pleine d’émotion, nous arrivons à Akureyri à 1h30 du matin.

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Jeudi 19 février (The Fantastic 4)

Le temps s’est fortement détérioré depuis notre escapade volcanique de la veille. D’ailleurs il a neigé toute la nuit à Akureyri et un joli manteau blanc recouvre désormais la petite ville.

Thordur vient me chercher en Superjeep à l’hôtel Icelandair à 10h00 pour commencer l’excursion « The Fantastic 4 ».

On fait d’abord un arrêt aux chutes d’eau de Goðafoss. C’est l’une des chutes les plus célèbres d’Islande. Elle est localisée dans la région de Mývatn, sur le fleuve Skjálfandafljót et fait 12 mètres de hauteur sur 30 mètres de largeur. En l'an 1000, le parlement islandais (l'Alþing) décide de suivre l'avis du diseur de loi Þorgeir Þorkelsson et adopte le christianisme. En revenant dans sa contrée, celui-ci montre l'exemple en jetant ses idoles de l'ancienne religion nordique dans cette chute. Le nom Goðafoss signifie « la chute des dieux » en souvenir de cet événement. D’habitude des cars déversent des milliers de touristes quotidiennement à cet endroit. Aujourd’hui il neige et donc je suis la seule personne avec Thordur à profiter de ce lieu magique. Les parois des chutes d’eau sont recouvertes de glace, ce qui donne un aspect mystérieux à ce lieu spirituel.

Nous visitons ensuite les Skútustaðagígar. Toponyme islandais signifiant littéralement en français « cratères de Skútustaðir », ce sont un ensemble de pseudo-cratères situés sur la rive méridionale du Mývatn. Ils sont nés il y a plus de 2000 ans lorsqu'une coulée de lave émise par des fissures du système volcanique du Krafla est entrée en contact avec les eaux du lac, créant des explosions de vapeur qui ont édifié ces cratères volcaniques dépourvus de racine. On trouve des pseudo-cratères uniquement à trois autres endroits en Islande et sur la planète Mars ! La ferme Skútustaðir, qui se trouve au pied des pseudo-cratères, fût nommée ainsi d’après un ancien héro célèbre appelé Viga-Skúta, qui possédait la hache mortelle Fluga.

Nous longeons ensuite les berges du lac Mývatn (« le lac des mouches »). C'est l'unique endroit habité des hautes terres et ce depuis l'installation des Vikings, entre les IXe et Xe siècles. Le lac, troisième étendue d'eau naturelle du pays, reste gelé six mois de l'année. Le nom du lac vient des nuées d'insectes (Chironomidae) dont se nourrissent les canards qui peuplent les bords du lac en été. Le coin est connu des ornithologues pour la quinzaine de canards qui y nichent à partir d'avril. C’est un endroit mystérieux où des scènes de la série Game of Throne furent tournées.

Puis nous visitons Dimmuborgir (le Château Noir), un champ de lave très sombre avec ses grottes et formes de lave qui défient l’imagination. Ces formations sont dues à l'érosion d'un lac de lave situé à l'origine sur des terrains humides. Les échappements de vapeur d'eau du terrain ont refroidi la lave lors de leur remontée dans le lac, provoquant des formations en colonnes. Ces colonnes étant moins sensibles à l'érosion que la lave environnante, elles ont émergé au cours du temps. Cet endroit fantastique inspira des légendes islandaises avec des trolls en toile de fond. En effet la forme torturée des roches volcaniques noirâtres fait penser à des êtres malfaisants pétrifiés, ces derniers se transformant en troll la nuit venue. C’est ici que vivent les Père Noël Islandais. Ce sont les 13 fils de Gryla et Leppaludi, des trolls vicieux qui vivent dans une grande caverne à Ludentarborgir. Les frères ont tous un nom amusant qui font souvent références à leurs préférences culinaires ou leurs intérêts. Il y a par exemple « Lécheur de Cuillères », « Essuyeur de Soucoupe », « Gobeur de Skyr » et le membre le plus bruyant de la fratrie « Claqueur de Portes » qui adore réveiller les gens en claquant les portes violemment. En été les Pères Noël peuvent rarement être observés car ils utilisent cette saison pour se reposer et dorment dans leur grotte. Cependant quand arrive l’hiver ils se réveillent et commencent à préparer la fête de la nativité. D’ailleurs, selon la légende, c’est au mois de décembre qu’on a le plus de chance de les rencontrer quand ils sont occupés à préparer Noël. Le meilleur moyen de les trouver est de marcher sur le chemin qui mène à Hallarflot et de crier très fort « Jolasveinn », qui veut dire « Père Noël » en Islandais!

Nous entrons ensuite dans la petite communauté de Vogar où une forte odeur de soufre nous titille les narines. En effet nous nous trouvons près des sources d’eau chaude de Mývatn. Nous déjeunons dans la ferme de Vogafjόs qui se trouve au bord du lac où je déguste leur spécialité, un délicieux gigot d’agneau. Il s’agit d’une ferme transformée en guesthouse avec son restaurant et son magasin de souvenirs. D’ailleurs nous pouvons contempler les vaches de l’étable à travers une baie vitrée qui donne sur le restaurant.

Après avoir visité la région du lac Myvatn, nous mettons le cap sur les fameuses chutes d’eau de Dettifoss, qui est la plus puissante d’Europe. Elle a une largeur de 100m et se précipite 44 m plus bas dans le canyon de Jökulsargljufur. Elle est située sur le cours du fleuve Jökulsá á Fjöllum, laquelle passe par le site volcanique de Holuhraun comme j’ai pu le constater les jours précédents. On peut y observer des parois gelées et des chandelles de glace énormes. D’ailleurs le réalisateur Ridley Scott a choisi Dettifoss pour créer un environnement surnaturel dans son film « Prometeus » pour la scène du début. On y voit un alien se sacrifier dans la chute d’eau.

Thordur me conduit également plus loin dans le canyon de Jökulsargljufur (« gorge de la Jökulsá ») où on bénéficie d’une vue panoramique sur le canyon. La gorge est formée par l'érosion de vastes empilements de coulées de lave par la Jökulsá á Fjöllum. Le fleuve franchit plusieurs chutes d’eau et de rapides. À chaque dénivellation, le lit de la rivière s'encaisse un peu plus entre les parois de la gorge qui prennent parfois l'aspect de falaises distantes d'environ 500 mètres et hautes d'environ 120 mètres. Les environs de la gorge comportant peu de relief, notamment dans le sud de la gorge, la Jökulsárgljúfur est parfois qualifiée de canyon et est comparée au Grand Canyon du Colorado, aux États-Unis, bien que les dimensions soient beaucoup plus modestes.

 

Ensuite nous visitons Hverir non loin de là avec ses terres colorées et un nombre de fumerolles et marmites de boue impressionnantes. Les eaux superficielles froides s’infiltrent jusqu’aux inclusions de magma, et se transforment en vapeur sous l’effet de la chaleur. La vapeur remonte, accompagnée de gaz contenant de l’hydrogène sulfuré qui donne aux sources chaudes leur odeur caractéristique. Dans les zones de sources chaudes, le mélange de l’hydrogène sulfuré avec l’air ambiant donne naissance à des dépôts de soufre. Près des évents de vapeur se forme en outre un mélange de silice et de gypse. Dans les marmites de boue, l’hydrogène sulfuré remonte au travers de l’eau de surface, donnant de l’acide sulfurique qui rend l’eau acide. Celle-ci dissout la roche et la terre pour former la boue caractéristique de ces marmites et de leur voisinage. C’est dans cette région que furent tourné des scènes du prochain Star Wars ! D’ailleurs Thordur était chargé d’emmener les techniciens de la production sur les lieux du tournage et il a eu l’occasion de voir une des héroïnes du film. Le site de Hverir fût également utilisé pour des scènes de la série Game of Throne. En fait le réalisateur utilisa la vapeur d’une des fumerolles pour simuler une tempête de neige, car lors du tournage il faisait grand beau ! Un vent glacial souffle et j’en profite pour me réchauffer les mains dans les fumerolles. Le spectacle qu’offre Hverir donne l’impression de se trouver sur une autre planète. Je fais attention de ne pas trop m’approcher des marmites de boue, car le sol pourrait se dérober sous mon propre poids et je finirais cuit comme une écrevisse.

Nous terminons l’excursion par Grjótagjá, une grotte creusée autrefois par la lave à travers la roche volcanique. Elle permet d'accéder à l'intérieur de la faille qui marque la séparation continentale dans la tectonique des plaques entre l'Europe et l'Amérique. Elle possède en son cœur un lac d'eau chaude vaporeuse et bleutée dans lequel il était possible de se baigner avant que la température n'y devienne trop élevée après les éruptions d'Ekla entre 1975 et 1984. En effet l’eau atteint environ 50°C et elle est par conséquent interdite à la baignade. Nous apercevons également le Hverfjall (en islandais la « montagne de la source chaude »). Ce stratovolcan, apparu il y a 2 500 ans, est le résultat d'une seule éruption appartenant au cycle de Hverfjall du Krafla. Le cône fait environ 250 mètres de haut et 200 mètres de profondeur pour un diamètre de 1 200 mètres. Son cratère explosif, semblable à ceux de la lune, a servi de base d'entraînement aux astronautes américains avant leur voyage de 1969.

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Les bains thermaux de Myvatn se trouvent juste à côté et nous ne pouvons pas résister à l’envie d’y prendre un bain. C’est une version réduite du célèbre Blue Lagoon, mais il y a beaucoup moins de monde. Le fond du bassin est constitué de sable et de gravier noir. L’eau est fournie par le puits de forage de la compagnie national d’énergie à Bjarnarflag. Nous profitons donc d’un bon bain relaxant dans une eau à 36-40°C alors qu’il est en train de neiger. Ça fait du bien !

Nous retournons ensuite à Akureyri après une journée bien remplie. Le temps est couvert et donc je n’ai pas l’occasion d’observer d’aurores boréales avant d’aller me coucher.

Vendredi 20 février (balade à Akureyri)

C’est ma dernière journée au Nord de l’Islande et malheureusement il neige. Toutes les excursions sont donc annulées malgré ma tentative d’organiser une sortie en motoneige.

Je décide donc de mettre à profit cette journée libre pour visiter la ville d’Akureyri.

Je commence par la dégustation d’un steak de baleine de Minke, appelé aussi petit rorqual, au restaurant Bautinn. Ce restaurant typique est situé au cœur de la ville et c’est un des plus vieux bâtiments d’Akureyri. C’est une grande première pour moi. Le steak est servi avec des légumes grillés, des pommes de terre, de la confiture d’airelles et une sauce brune. Je découvre que la viande de baleine est vraiment délicieuse ! Ma conscience est tranquille, car cette espèce de baleine abonde et les pêcheurs islandais respectent le quota annuel.

Ensuite je visite le musée d’art d’Akureyri. L’entrée est gratuite et je découvre des tableaux représentant le passé d’Akureyri ainsi que sa mythologie.

Akureyri est une ville d’art. On y trouve en effet de nombreuses œuvres disséminées partout dans les rues et les parcs. Les zones artistiques sont divisées en 6 districts : la forêt de Kjarnaskόgur, la vieille ville, le flanc de coteau inférieur, le centre-ville, le district Oddeyri et les districts du flanc de coteau et de la rivière Glerá. Je n’ai pas le temps de tout visiter et donc j’opte pour le flanc de coteau inférieur. Je visite entre-autre le jardin botanique d’Akureyri et les statues du collège d’Akureyri. J’ai également l’occasion de traverser des zones résidentielles recouvertes de neige avant de descendre le long du fjord pour déguster une bonne glace achetée chez le glacier du coin et de me désaltérer dans un bowling avec un café bien chaud.

Après une bonne journée de marche dans le froid et la neige, je m’octroie une soirée culturelle dans un des deux cinémas de la ville. J’avais espéré pouvoir chasser les aurores boréales le soir même avant que Thordur m’informe qu’il n’y aurait pas d’espoir. Je passe donc la soirée à regarder « The Theory of Everything », un film qui narre la vie du physicien et cosmologiste Stephen Hawking et en particulier de sa jeunesse. C’est un film qui me convient parfaitement et heureusement tous les films sont en Anglais en Islande.

Samedi 21 février (Golden Circle Afternoon Tour)

Décollage matinal d’Akureyri pour Reykjavik. Après 45 minutes de vol au-dessus d’un relief enneigé j’atterri à Reykjavik à 10h40. Un taxi me dépose à l’hôtel Odinsve où la réceptionniste m’annonce qu’il n’y a plus de chambres libres. En effet j’ai été victime de surbooking de l’hôtel, mais heureusement une solution alternative plutôt plaisante m’est offerte. Ils me proposent de me reloger à l’hôtel Holt pour la nuit, c’est un établissement luxueux à quelques pâtés de maison de là. Une offre pareille ne se refuse pas !

Avant de prendre mes quartiers dans le nouvel hôtel, j’attends un bus d’Extremeiceland pour un après-midi d’excursion dans le Sud-Ouest de l’île, le Golden Circle Afternoon Tour. Après une heure d’attente sans voir aucun bus arriver, je m’enquiers auprès de la réceptionniste qui appelle l’agence. Surprise, apparemment ils m’ont oublié et sont déjà en route pour l’excursion ! Heureusement le manager de l’agence accepte de détacher un mini-bus qui vient me chercher à l’hôtel afin de rattraper le convoi. Il s’ensuit une course poursuite qui sera fructueuse, car nous parvenons à rejoindre le bus qui faisait route vers le Sud. Je prends place dans ce dernier et nous poursuivons le circuit comme prévu. Nous faisons une halte à Thingvellir, la faille qui sépare les plaques tectoniques Américaines et Européennes, avant d’aller chercher un groupe de touristes dans un hôtel au bord de la mer.

Nous visitons ensuite Gullfoss, une succession de deux impressionnantes chutes d’eau, et Geysir, un ensemble de sources chaudes comprenant le seul geyser actif d’Islande, Strokkur.

Sur le chemin du retour pour Reykjavik, nous faisons une halte à la chute d’eau Faxa. Après une journée pleine de rebondissements, je soupe au Chuck Norris Grill à Reykjavik ! Décidément l’Islande regorge de curiosités. C’est un restaurant qui rend hommage au célèbre acteur et maître d’arts martiaux, Chuck Norris. On y sert des burgers aux noms évocateurs et les fameux aphorismes humoristiques sur Chuck Norris sont illustrés un peu partout.

Comme convenu, je passe ensuite la nuit dans une des suites de l’hôtel Holt.

Dimanche 22 février (journée libre à Reykjavik)

Ce jour-là il était prévu d’entamer une excursion de trois jours avec Extremeiceland. Malheureusement le départ fût repoussé d’une journée à cause de vents violents qui atteignaient 150km/h ! D’ailleurs les autorités ont dû fermer les routes qui menaient au Sud-Est. Je retourne donc à l’hôtel Odinsve et contacte Christophe et Rémi pour voir si on peut passer la journée ensemble étant donné le peu de perspective touristique due à la météo. Mes compères me rejoignent à la cathédrale de Reykjavik avant de dîner dans un restaurant typique où on peut déguster du requin fermenté.

Nous passons le reste de l’après-midi à visiter la ville et à faire des repérages pour chasser les aurores. Nous découvrons le port de Reykjavik avec son usine à poisson qui abrite une œuvre d’art assez bizarre, Þúfa, qui signifie « monticule ». Il a été créé par l’artiste visuel Ólöf Nordal en 2013 d’après une commande de la compagnie de transformation halieutique HB Grandi. Le monticule de 8 mètres est recouvert d’herbe et nous l’escaladons en suivant un passage étroit qui monte en spirale. Le vent est tempétueux et nous devons nous accrocher pour ne pas basculer dans le vide. A son sommet se trouve une maison miniature dans laquelle du vrai poisson est en train de sécher. Une vue panoramique s’offre à nous sur le Mont Esja, la baie de Faxaflói, le centre de concert et de conférence Harpa et bien évidemment le port et la vieille ville de Reykjavik. Nous faisons une halte au musée des aurores boréales avant de faire des repérages au phare de Reykjavik. Le temps est maussade et j’avais espéré une ouverture durant la nuit pour chasser les aurores. Malheureusement les conditions ne s’améliorent pas et je me résous à rester à l’hôtel.

Lundi 23 février (chutes d’eau et aurores boréales)

Le vent s’est légèrement calmé et un mini-bus d’Extremeiceland vient me chercher à l’hôtel pour débuter notre excursion.

Nous visitons les splendides chutes d’eau de Seljalandfoss et Skogafoss qui se trouvent au pied du fameux volcan Eyafjallajökull.

Ensuite nous poursuivons à la plage de sable noir avec les rochers Reynisdrangar. La mer est démontée après cette période de vent tempétueux.

Nous poursuivons notre route jusqu’au petit village de Kirkjubæjarklaustur où nous faisons le point sur la suite du voyage, car les vents sont réputés pour être particulièrement violents à l’Est de notre localisation. Ce village de 120 habitants est un centre de services important pour la population locale ainsi que pour les touristes qui s’intéressent par exemple aux Lakagígar ou à l'Eldgjá situés dans les environs. Nous en profitons pour aller observer le sol atypique à proximité du village. En effet à cet endroit se trouve le Kirkjugólf (« sol de l'église »), des orgues basaltiques rabotées par l’érosion glaciaire formant un pavage hexagonal régulier. Finalement le guide prend la décision de prendre le risque de continuer vers l’Est jusqu’à notre hôtel Smyrlabjörg. En route nous avons la chance de voir passer la station spatiale internationale avant d’apercevoir des lueurs vertes ondulantes au-dessus du glacier Vatnajokull. Il s’agit d’aurores boréales et le temps est dégagé ! Les premières lueurs apparaissent très tôt vers 9h00-9h30, ce qui promet une soirée particulièrement fructueuse.

A l’hôtel Smyrlabjörg je me dépêche de souper, car l’intensité des aurores ne cesse d’augmenter. Nous dégustons un buffet avec des plats typiques, tels que du cœur et de la langue de rennes.

Le ciel est toujours dégagé malgré les rafales de vent. Le spectacle des aurores juste au-dessus de nos têtes est à couper le souffle. Avec un Kp de niveau 6, leur intensité est particulièrement forte. Cet indice correspond à la valeur pour laquelle on mesure les effets d’un champ magnétique important et varie entre 0 et 9 (échelle fermée). Il mesure les variations du champ magnétique de la Terre, plus particulièrement géomagnétique. Kp provient de « planetarische Kennziffer » qui signifie index planétaire. L’activité magnétique est mesurée pendant une période de 3 heures.

Les aurores ondulent et forment des drapés magnifiques de couleur vert et pourpre. C’est un véritable opéra photonique qui restera gravé dans ma mémoire. A minuit le rideau tombe et il faut se résigner à aller se coucher.

Mardi 24 février (Jökulsarlon et Svinafellsjokull)

Une grosse journée s’annonce, car plusieurs activités sont prévues et nous devons ensuite retourner à la capitale. Nous nous arrêtons d’abord à Hali pour voir le bâtiment en forme de bibliothèque et ses dos de livres de 2 mètre de haut. Il s’agit d’un musée et d’un centre culturel consacré à la mémoire de Þórbergur Þórðarson (1888 – 1974), l’un des auteurs islandais les plus connus. C’est à la ferme Hali que cet écrivain et espérantiste islandais a grandi. L’exposition propose un aperçu unique de la vie et des œuvres de ce merveilleux auteur, ainsi que des objets anciens culturels et des histoires des générations passées.

Nous poursuivons sur Jökullsarlon, toponyme islandais signifiant littéralement en français « lagune du glacier ». C’est le plus connu et le plus grand des lacs proglaciaires en Islande. D’ailleurs c’est le seul endroit où une des langues glaciaires du Vatnojökull atteint la côte. Apparu entre 1934 et 1935, la superficie de ce lagon est d’environ 18 km2. Sa profondeur maximum de 260 m lui donne la première place entre les lacs les plus profonds du pays. Le Jökulsárlón offre des vues exceptionnelles sur la calotte glaciaire du Vatnajökull, vaste dôme de glace qui s'élève à une hauteur de 910 m. Elle commence à se déverser 19 km avant d'arriver dans la lagune. En été, les icebergs dérivent des années dans le lac, en direction de son embouchure, fondent en petits cubes de glace et disparaissent dans la mer. En hiver, le lac gèle et bloque les icebergs. Les énormes blocs de glace qui se détachent du Vatnajökull peuvent atteindre 30 m de haut. Ils s’échouent fréquemment sur la plage de sable noir. Les couleurs de ces petits icebergs vont du turquoise au bleu foncé, en passant par le jaune qui vient du sulfure volcanique, le noir qui vient de la cendre des volcans et le blanc en plusieurs nuances. Un grand nombre d'oiseaux de mer, comme les sternes arctiques, les goélands, les pingouins torda, ou les eiders qui nichent à proximité, se réunissent pour attraper le hareng, la truite, le saumon et d'autres poissons, ou encore le krill. De plus des phoques se prélacent sur les icebergs et certains viennent à notre rencontre en nageant. Le lagon a été le cadre de deux films de la série James Bond « Dangereusement vôtre » et « Meurs un autre jour » ainsi que d'un Batman (« Batman Begins »). Il a servi au décor du village de Sibérie dans le film « Lara Croft: Tomb Raider ».

Nous dînons ensuite dans un restaurant de routier au bord de la route n°1 avant de faire une excursion au glacier Svinafellsjokull. C’est une des langues glaciaires du Vatnajökull et il est facilement accessible par une courte marche sur un sentier non loin de Skaftafell. D’ailleurs la configuration des lieux est particulièrement propice pour y tourner des films. C’est pour cette raison que le réalisateur Christopher Nolan l’utilisa comme scène pour son film « Interstellar » en 2014 et « Batman Begins » une dizaine d’années plus tôt. Nous chaussons nos crampons et je pars à la découverte de ce somptueux glacier armé de mon casque et d’un piolet. Le guide nous explique comment évoluer sur cette montagne de glace mouvante. C’est un cadre magnifique pour un baptême glaciaire !

Nous retournons finalement à Reykjavik en faisant une halte dans une ferme pour admirer des chevaux Islandais. Ce sont des chevaux de selle de petite taille qui forme l’unique race chevaline originaire d’Islande. Ces animaux sont vraisemblablement les descendants directs des montures amenées en bateau par les Vikings lors de la colonisation de l'Islande. Les Islandais sont toujours restés très fiers de leurs chevaux qu'ils citent régulièrement dans leurs sagas.

Arrivée tardive à Reykjavik et nuit à l’hôtel Odinsve.

Mercredi 25 février (visite de musées à Reykjavik et chasse aux aurores)

J’avais prévu de faire de la plongée à Silfra, mais malheureusement ma dernière journée en Islande est victime du mauvais temps. La fissure de Silfra est l'un des secrets les mieux gardés de l'Islande et est connue dans le monde entier pour ses dégradés de bleu hors du commun. Elle se situe dans le lac de Thingvallavatn dans le Parc National de Thingvellir. Étant donné que Silfra fait partie de la dorsale médio-atlantique, il est possible de plonger entre deux continents, l'Amérique du Nord et l'Eurasie. Par endroit on peut même toucher les deux plaques tectoniques en même temps !

Le temps est tellement maussade que même les sorties en moto-neige et la visite d’un centre de sauvetage que j’avais réservé comme activité alternative à la plongée sont annulés !

Je décide donc de consacrer cette journée à la visite de Reyjavik. Je découvre le musée de la Saga Islandaise, le musée des aurores, le Volcano House, le Harpa Concert Hall et le musée islandais du phallus.

Le musée de la Saga recrée des moments clés de l’histoire Islandaise, des moments qui ont déterminés le destin de ses habitants et qui offrent un aperçu de la vie astreignante de ces derniers sur plus d’un millénaire.

Le musée des aurores se trouve juste à côté et offre des explications passionnantes sur ce phénomène astronomique saisissant. Il y a par exemple un film panoramique HD permanent sur les aurores et des histoires et légendes sur les aurores dans le monde entier.

Je ne pouvais évidemment pas oublier de m’arrêter au Volcano House. J’en profite pour visionner un film captivant sur les volcans Islandais.

La salle de concert et centre des congrès Harpa est un bâtiment emblématique de Reykjavik. Ce bâtiment futuriste inauguré en 2011 est constitué d'un cadre en acier revêtu de panneaux de verre de formes irrégulières et de différentes couleurs.

Le Musée National des Phallus est probablement le seul au monde de son espèce, car il réunit les organes génitaux de tous les mammifères d’Islande. La phallologie est une science jeune, elle n'a pas plus de vingt-cinq ans, et a été jusqu'ici délaissée en Islande. Elle n'a été jusqu'à présent que l'appendice d'autres domaines comme l'Histoire, l'Esthétique, la Psychologie, la Littérature et d'activités artistiques comme la Musique et le Ballet. Le musée propose donc d’étudier les phallus d’une façon systématique et scientifique. Il compte 217 phallus, le plus souvent entiers, représentant pratiquement l'intégralité de la faune mammifère. On y trouve 56 pièces provenant de 17 espèces de cétacés, un attribut d'ours, 38 pièces provenant de 7 espèces de phoques et de morses, et 21 espèces de mammifères terrestres sont représentés par 120 pièces. Les 46 mammifères du pays et de ses côtes sont dignement représentés par 281 pièces. Ajoutons à cela la promesse d'un homo sapiens de faire don (après sa mort) au musée de ses propres attributs comme en témoigne un acte de donation exécuté en bonne et due forme.

Le soir le ciel se dégage enfin et c’est donc mon ultime chance pour faire une dernière chasse aux aurores. J’avais initialement prévu de passer la nuit à l’hôtel Odinsve, mais Christophe et Rémi proposent de m’accueillir chez eux à Keflavik, une commune islandaise située à proximité de l’aéroport international. Nous passons une partie de la nuit à parcourir la péninsule de Keflavik, y compris la région du Blue Lagoon, mais malheureusement les aurores se feront capricieuses.

Jeudi 26 février (retour à Genève)

Après une courte nuit à Keflavik, Christophe m’accompagne à l’aéroport pour retourner en Suisse.

Fin de l’aventure !